samedi 23 février 2013

QUAND TU DORS par Jacques PREVERT




QUAND TU DORS

Toi tu dors la nuit
moi j'ai de l'insomnie
je te vois dormir
ça me fait souffrir

Tes yeux fermés ton grand corps allongé
c'est drôle, mais ça me fait pleurer
et soudain, voilà que tu ris
tu ris aux éclats en dormant
où donc es-tu en ce moment
où donc es-tu parti vraiment
peut-être avec une autre femme
très loin, dans un autre pays
et qu'avec elle, c'est de moi que tu ris

Toi, tu dors la nuit
moi, j'ai de l'insomnie
je te vois dormir
ça me fait souffrir

Lorsque tu dors je ne sais pas si tu m'aimes
t'es tout près mais si loin quand même
je suis toute nue serrée contre toi
mais c'est comme si j'étais pas là
j'entends pourtant ton cœur qui bat
je ne sais pas s'il bat pour moi
je ne sais rien, je ne sais plus
je voudrais qu'il ne batte plus ton cœur
si jamais un jour tu ne m'aimais plus

Toi tu rêves la nuit
moi j'ai de l'insomnie
je te vois rêver
ça me fait pleurer

Toutes les nuits je pleure toute la nuit
et toi tu rêves et tu souris
mais cela ne peut plus durer
une nuit sûrement je te tuerai
tes rêves alors seront finis
et comme je me tuerai aussi
finie aussi mon insomnie
nos deux cadavres réunis
dormiront ensemble dans notre grand lit

Toi tu rêves la nuit
moi j'ai de l'insomnie
je te vois rêver
ça me fait pleurer

Voilà le jour et soudain tu t'éveilles
et c'est à moi que tu souris
tu souris avec le soleil
et je ne pense plus à la nuit
tu dis les mots toujours pareils
"As-tu passé une bonne nuit"
et je réponds comme la veille
"Oui mon chéri j'ai bien dormi
et j'ai rêvé de toi comme chaque nuit"

samedi 16 février 2013

PRIERE D'INTERCESSION POUR LES TRAVAILLEURS


Prière exprimée par l'Eglise réformée de France - Source : Le Livre d'Or de la Prière par Alfonso M. di Nola - Marabout Université - 1957 -

Seigneur, Dieu de vérité, de justice et d'amour, toi qui nous as créés solidaires les uns des autres, délivre-nous de l'injustice sociale, à laquelle nous consentons et participons chaque jour.
Préserve ton Eglise de la séduction de l'argent, des compromissions de ce monde et du silence complice devant l'iniquité. Ne permets pas qu'en se réfugiant en toi elle oublie jamais les dures réalités de l'existence.
Nous te prions pour les paysans et les ouvriers, pour les artisans et les employés, pour tous ceux qui peinent de nuit ou de jour, dans la froid ou la chaleur, sur la terre et sur la mer, dans les champs et dans les mines, au foyer ou loin des leurs. Ne permets pas qu'ils soient fraudés de leur juste salaire et de leur dignité humaine; accorde-leur de jouir des fruits de leur travail sans les voir accaprés ou dilapidés par l'avarice ou la folie des hommmes.
Donne à tous, salariés et patrons, joie et conscience dans l'accomplissement de leur tâche. Inspire-leur la vraie charité qui combat l'injustice sans amertume comme sans mépris, sans haine comme sans orgueil.
Toi, le Maître de la vigne, qui as voulu que personne ne se tînt sur la place sans emploi, nous te prions pour les chômeurs. Oriente chaque homme vers un travail qui lui permette de répondre à la vocation que tu lui adresses dans la communauté humaine.
Nous te prions pour les savants. Dirige leurs recherches dans le respect de ton oeuvre, vers la vie et non vers la mort.
Nous te prions pour les artistes, afin qu'en cherchant à traduire le soupir de la création, leur témoignage contribue à nous tourner vers la lumière, et à faire jaillir en nous ta louange.
Nous te prions pour les foules sans berger. Fais que les servitudes de leur condition ne les empêchent pas d'aller à toi.
Donne à ton Eglise de leur annoncer l'Evangile libérateur.

samedi 9 février 2013

LE CANTIQUE DES CANTIQUES * Extrait *


Mon bien-aimé parle et me dit:
Lève-toi, mon amie, ma belle, et viens !
Car voici, l'hiver est passé;
La pluie a cessé, elle s'en est allée.
Les fleurs paraissent sur la terre,
Le temps de chanter est arrivé,
Et la voix de la tourterelle se fait entendre dans nos campagnes
.
Le figuier embaume ses fruits,
Et les vignes en fleur exhalent leur parfum.
Lève-toi, mon amie, ma belle, et viens!
Ma colombe, qui te tiens dans les fentes du rocher,
Qui te caches dans les parois escarpées,
Fais-moi voir ta figure,
Fais-moi entendre ta voix;
Car ta voix est douce, et ta figure est agréable.
Prenez-nous les renards,
Les petits renards qui ravagent les vignes;
Car nos vignes sont en fleur.
Mon bien-aimé est à moi, et je suis à lui;
Il fait paître son troupeau parmi les lis.
Avant que le jour se rafraîchisse,
Et que les ombres fuient,
Reviens!... sois semblable, mon bien-aimé,
A la gazelle ou au faon des biches,
Sur les montagnes qui nous séparent.
(2.10 à 2.17)

dimanche 3 février 2013

LA BELLE ET LE PETIT CHIEN * FABLE * par Yves BERNARD * 1992 *

LA BELLE ET LE PETIT CHIEN

Une dame s'assit dans le compartiment
Où voyageait notre ami Jean.
Une dame, que dis-je ? - Une beauté parfaite !
Il s'agissait tout simplement
De la "Miss France" du moment.

Notre Jean sommeillait; il releva la tête
Et ne songea plus à dormir :
Ah ! ces yeux...ces cheveux...ce front....ce nez...ces lèvres...
Ce pur profil...Cette taille à ravir...
Ces bras blancs...ce corsage à vous donner des fièvres..
Et ces jambes...Par tous les dieux !
Il les mangeait presque des yeux.

Miss France cependant, distraite, indifférente
A cet hommage mitoyen,
Jouait avec un petit chien.
Elle le caressait d'une façon charmante,
Le serrait dans ses bras, le baisottait si bien
Que notre ami n'y put tenir : "Oh ! quelle chance
Il a, ce petit animal,
De goûter nuit et jour votre aimable présence !
Pour moi, ce genre d'existence
A quelque chose d'idéal,
Que j'aimerais être à sa place !

- A sa place ! Grand bien vous fasse !
(Dit la belle en riant) Monsieur, si vous saviez...
- Quoi donc ? Dites-le moi de grâce !
- Si je vous le disais, vous en concevriez
Tout au contraire, une peur bleue !
- Quoi ! (dit-il) vos baisers, vos regards langoureux...
Expliquez-moi par quel mystère....

Miss France chantonnait d'un air malicieux :

" Prends sa place si tu veux,
C'est chez le vétérinaire
Que nous allons tous les deux
Pour qu'on lui coupe la queue !"

- De partager son sort, êtes-vous désireux ?
Cela me ferait trop de peine !

Le ciel a bien raison de ne pas exaucer
Toutes les prières humaines,
Tant de nos voeux sont insensés,
Tant de nos suppliques sont vaines !
Sans trop savoir ce qui nous rend heureux,
Nous réclamons à perdre haleine
Des dons qui nous feraient des jours calamiteux.

Yves Bernard - 1992 - "Sur la guitare et la cithare " Editions GAP - 73490 La Ravoire